
Kenya: des trafiquants de fourmis, dont deux Belges, condamnés à une lourde amende

Un tribunal kényan a condamné mercredi quatre personnes, dont deux adolescents belges, à verser une amende de plus de 7.000 dollars pour avoir tenté de faire sortir clandestinement des milliers de fourmis vivantes du pays.
L'affaire a défrayé la chronique dans ce pays d'Afrique de l'Est où le Kenyan Wildlife Service (KWS), l'agence nationale de conservation, a accusé les quatre individus de se livrer à de la "biopiraterie".
Les Belges David Lornoy et Seppe Lodewijckx, âgés de 18 ans, le Vietnamien Duh Hung Nguyen et le Kényan Dennis Nganga ont tous plaidé coupables de possession de fourmis, mais ont nié avoir cherché à faire le trafic de ces insectes.
Selon l'acte d'accusation consulté par l'AFP, les suspects belges ont été interpellés le 5 avril dans une pension bordant le lac Naivasha, dans le centre du Kenya, en possession de 5.000 fourmis reines - dont l'espèce Messor cephalotes, originaire de la région, donc chacune peut valoir une centaine d'euros - insérées dans 2.244 tubes d'essai.
Un document judiciaire indique que les fourmis, d'une valeur marchande estimée à environ 7.700 dollars, peuvent survivre au moins deux mois dans les contenants.
David Lornoy a été présenté comme un passionné de fourmis, qui gardait des colonies chez lui en Belgique et faisait partie d'un groupe Facebook consacré à ces insectes.
MM. Nganga et Nguyen, selon leur acte d'accusation, ont été arrêtés le 5 avril également, dans les comtés de Nairobi et de Machakos avec plusieurs centaines de fourmis dans quelque 140 seringues. Ils ont également plaidé coupable.
Les deux affaires étaient distinctes, mais les quatre accusés ont été jugés ensemble.
- "traite des esclaves" -
La magistrate principale, Njeri Thuku, a fait allusion à la traite des esclaves lors de l'énoncé du verdict.
"Imaginez être violemment expulsé de chez vous et entassé dans un conteneur avec de nombreuses autres personnes comme vous. Imaginez ensuite être isolé et coincé dans un petit espace où la seule source de nourriture pour un avenir proche est de l'eau avec du glucose", a-t-elle écrit.
"On dirait presque une référence" à la "traite des esclaves". "Pourtant, il ne s'agit pas de traite des esclaves, mais de commerce illégal d'espèces sauvages", a-t-elle ajouté.
La possession de tout spécimen ou trophée d'animal sauvage sans permis est une infraction pénale au Kenya, passible d'une amende minimale d'environ 10.000 dollars et/ou d'une peine de prison potentielle d'au moins cinq ans.
Le tribunal a déclaré mercredi que les suspects pouvaient soit passer un an en prison ou bien payer une amende d'un million de shillings (7.740 dollars), soit la valeur estimée par la police des fourmis saisies.
La juridiction a ajouté que les deux Belges "ne ressemblaient pas à des braconniers typiques" et qu'ils ignoraient la loi, estimant toutefois que l'affaire reflète un scénario "qui s'est déjà produit au cours des siècles passés (...) quand l'Afrique possédait des ressources pillées par l'Ouest et maintenant par l'Est".
KWS a porté plainte contre les quatre jeunes hommes, affirmant qu'il s'agissait non seulement d'un "crime contre la faune sauvage, mais aussi d'un acte de biopiraterie".
Les suspects "avaient l'intention de faire passer les fourmis en contrebande vers des marchés d'animaux exotiques de grande valeur en Europe et en Asie, où la demande d'espèces d'insectes rares est en hausse", a-t-elle ajouté dans un communiqué.
Z.Kaczmarek--GL