
Le cognac reste une pomme de discorde entre Paris et Pékin après une rencontre

Le cognac français reste "à ce stade" soumis à des sanctions chinoises, a affirmé jeudi le ministre de l'Economie Eric Lombard après une réunion avec le vice-Premier ministre chinois, He Lifeng, qui a lui appelé à un climat d'affaires "plus équitable" entre les deux pays.
Les discussions entre la France et la Chine concernant le contentieux sur le cognac français n'ont pas permis d'aboutir à une solution "à ce stade", a affirmé jeudi le ministre français à l'issue d'une réunion avec le dirigeant chinois.
"Mais je sais néanmoins pour en avoir longuement parlé avec son excellence He Lifeng que la porte de la discussion reste ouverte", a-t-il poursuivi, à l'heure où des sanctions chinoises contre ce secteur affectent durement la filière française.
Après avoir mené ces derniers jours pour la Chine des négociations à Genève avec les Etats-Unis sur le dossier des droits de douane punitifs, He Lifeng achevait jeudi une visite de trois jours en France au cours desquels il s'est notamment entretenu avec des représentants d'entreprises de la cosmétique, de la pharmacie et de l'aéronautique, et a visité une ferme dans l'Eure.
Jeudi s'est tenu la 10e édition du dialogue économique et financier de haut niveau franco-chinois auquel, outre He Lifeng et Eric Lombard, a aussi participé la ministre française de l'Agriculture Annie Genevard, sur fond de conflit persistant autour des sanctions chinoises sur l'industrie du cognac.
Des mesures antidumping temporaires de Pékin imposent depuis mi-novembre aux importateurs de brandys européens (eaux-de-vie de vin, essentiellement du cognac) de déposer auprès des douanes chinoises une caution, en représailles à une procédure européenne visant les subventions d'État dont bénéficient les véhicules électriques fabriqués en Chine.
- 1,4 milliard d'exportations -
Ces mesures ont porté un coup en France à la filière cognac, qui affirme perdre 50 millions d'euros par mois depuis leur instauration.
"J'ai souhaité insister sur l'importance pour nous de revenir à la solution qui prévalait avant 2024", Eric Lombard, rappelant que le cognac représente 1,4 milliard d'euros d'exportations annuelles françaises vers la Chine.
"Il s'agit pour la France d'un sujet de première importance", a-t-il encore dit devant la presse.
La Chine représente à elle seule un quart des exportations de cognac, selon le Bureau national français interprofessionnel du cognac.
La réponse du dirigeant chinois sur ce sujet a été brève, He Lifeng se contentant de dire qu'"à la demande de l'industrie nationale chinoise, la Chine a ouvert une enquête antidumping sur le brandy originaire de l'Union européenne, conformément à la loi".
"L'autorité chargée de l'enquête prendra une décision sur la base des faits", a-t-il poursuivi.
La Chine suspecte les producteurs français de baisser excessivement le prix de leurs produits pour faciliter l'accès au marché chinois, une accusation que la France rejette fermement.
Pékin a déjà infléchi sa position ces dernières semaines en repoussant de trois mois l'application définitive de droits de douane supplémentaires, à l'issue d'une visite du chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot.
He Lifeng a toutefois dit souhaiter que "les entreprises françaises augmentent leurs investissements en Chine", tout comme il a appelé les entreprises chinoises à "investir" et "faire des affaires en France". Il s'est aussi dit ouvert à la coopération dans les domaines de l'intelligence artificielle, la transition climatique, les services financiers, le nucléaire et l'agriculture.
Le dirigeant chinois s'est montré en revanche plus offensif au sujet du climat des affaires: son pays "espère que la France offrira un climat (...) plus équitable, plus juste et plus prévisible", a-t-il affirmé.
Outre le conflit sur le cognac, la France n'exporte par ailleurs plus de viande bovine vers la Chine depuis fin 2024, du fait d'un embargo total décrété par Pékin, lié à la fièvre catarrhale ovine (FCO), une maladie non transmissible à l'homme qui affecte essentiellement les ovins mais aussi les bovins.
La viande bovine française est "bienvenue" sur le marché chinois, avait déclaré mardi le vice-Premier ministre chinois lors d'une visite dans une ferme bovine à Harquency (Eure), sans donner ni calendrier ni détails sur la levée des restrictions actuelles.
M.Stefanski--GL