L'Assemblée adopte définitivement le budget de la Sécurité sociale pour 2026
L'Assemblée nationale a définitivement adopté mardi la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026, premier texte budgétaire validé sans 49.3 depuis l'absence de majorité absolue dans l'hémicycle en 2022.
Le budget de la Sécu, qui contient la suspension de l'emblématique réforme des retraites, a été adopté par 247 contre 232. Une victoire arrachée par le Premier ministre Sébastien Lecornu à force de compromis, notamment avec le Parti socialiste.
Les abstentions très majoritaires des écologistes ont eu aussi un rôle prépondérant, pour combler celles d'une partie des groupes Horizons et LR, membres du camp gouvernemental, mais échaudés par les concessions au PS. L'alliance Rassemblement national-UDR et les Insoumis ont unanimement voté contre.
"Depuis trois ans, jamais un budget de la Sécurité sociale n'avait autant été débattu", a déclaré la ministre de la Santé Stéphanie Rist (Renaissance). "C'est une victoire du Parlement", a abondé la présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet face à la presse à l'issue du scrutin (Renaissance).
Peu après Mathilde Panot, cheffe des députés LFI a dénoncé au contraire des socialistes qui ont "changé d'alliance" et une "forte responsabilité des écologistes". Elle a aussi annoncé que son groupe saisirait le Conseil constitutionnel sur ce budget de la Sécu.
Encore il y a peu, beaucoup doutaient d'une possible adoption du premier des deux textes budgétaires, sur lequel le gouvernement de Michel Barnier était tombé fin 2024. Lors d'un vote presque identique il y a une semaine, l'Assemblée avait une première fois approuvé la copie, soumise à son dernier mot mardi après un dernier passage express au Sénat.
Pour Sébastien Lecornu, cette étape couronne au moins temporairement sa méthode, à coup de consultations et de concessions successives, parfois annoncées par lui-même dans l'hémicycle.
Mais les tractations sur le budget de l'Etat, elles, se poursuivent avec des négociations décisives jusqu'au week-end, et un accord qui s'annonce bien plus complexe, alors que la date butoir du 31 décembre se rapproche.
- Budget profondément remanié -
Durant les longues semaines de débats sur le budget de la Sécu, le gouvernement a vu sa copie profondément remaniée par les députés.
Ils ont notamment supprimé le gel des pensions de retraite et minima sociaux, et contraint l'exécutif à renoncer à doubler les franchises médicales.
Mardi, les syndicats FO et CGT ont toutefois manifesté devant l'Assemblée, critiquant notamment la limitation de la durée des arrêts maladie, ou une taxe sur les mutuelles dont ils craignent la répercussion sur les cotisations.
"Cette taxe d'un milliard pèsera à terme sur nos concitoyens", a prévenu le président de la Mutualité, Eric Chenut sur RTL, annonçant que les complémentaires à statut mutualiste augmenteront leurs cotisations en 2026.
Le texte prévoit par ailleurs la création d'un nouveau congé de naissance, ou d'un "réseau France santé" voulu par M. Lecornu pour l'accès aux soins.
Quant au déficit anticipé pour la Sécurité sociale, il est évalué à 19,4 milliards d'euros en 2026 (contre 23 milliards en 2025). Mais au prix de transferts de 4,5 milliards d'euros des caisses de l'Etat vers celles de la Sécu.
Des transferts qui contribuent à compliquer l'équation pour le budget de l'Etat, où ils doivent être compensés.
- "Un grand non" -
La copie du budget de l'Etat adoptée lundi au Sénat porterait le déficit à 5,3% du PIB. Or le gouvernement a placé l'objectif à 5%.
Une commission mixte paritaire (CMP) réunissant sept députés et sept sénateurs doit tenter de trouver un accord vendredi et possiblement samedi, une opération périlleuse au vu des divergences entre les deux chambres.
Les négociations porteront notamment sur la question des recettes, alors que les socialistes réclament des mesures de justice fiscale, quand la droite se montre intransigeante dans son refus de nouveaux prélèvements.
Même en cas d'accord, il faudrait encore qu'il puisse être adopté la semaine prochaine à l'Assemblée. Et ce alors que les socialistes promettent cette fois de s'abstenir au mieux, et les Écologistes de voter contre.
"Nous ne négocierons pas un budget qui est profondément inacceptable", a prévenu mardi la présidente du groupe écologiste, Cyrielle Chatelain. "Ce sera un grand non."
Autres possibilités: utiliser le 49.3 en s'assurant d'une non-censure dans la foulée, ou se résoudre à une loi spéciale pour assurer le maintien temporaire du financement des administrations, avec une reprise des négociations en janvier.
H.Zajac--GL