Lecornu reçoit les oppositions, socialistes et écologistes restent sur leur faim
Les socialistes, au centre des attentions de Sébastien Lecornu pour nouer un accord sur le budget 2026, ont regretté mercredi à l'issue d'une première rencontre à Matignon n'avoir rien appris des intentions du Premier ministre, agitant de nouveau la menace d'une censure, et ce dès la déclaration de politique générale.
"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, à l'issue de ce rendez-vous qui a duré près de deux heures.
Sébastien Lecornu reçoit mercredi ses opposants politiques - à l'exception de La France insoumise qui a refusé l'invitation -, à la veille d'une journée importante de mobilisation sociale.
"On n'a pas eu de réponses très claires", a renchéri la patronne des Ecologistes Marine Tondelier, reçue en début d'après-midi. Donc "soit Sébastien Lecornu renverse la table, soit il sera renversé", a complété la cheffe de file des députés Cyrielle Chatelain.
Les représentants du Rassemblement national Marine Le Pen et Jordan Bardella sont reçus depuis 16H00, avant le PCF à 18H00 et Place publique à 19H30. Tous menacent ouvertement de censure ce nouveau Premier ministre très proche d'Emmanuel Macron, s'il ne répond pas à leurs demandes.
Sébastien Lecornu, qui a déjà échangé la semaine dernière avec les dirigeants du "socle commun" de la droite et du centre, ainsi que les syndicats et le patronat, recevra à nouveau jeudi, pour le déjeuner, les chefs de partis de ce socle, désireux de mieux coordonner la fragile coalition gouvernementale.
- "Equation" -
François Bayrou avait obtenu la mansuétude du PS sur le budget 2025 en ouvrant un conclave sur la réforme des retraites, qui s'est soldé par un échec. Puis il a présenté à la mi-juillet un sévère plan de redressement des finances publiques qui a fait hurler toutes les oppositions.
"Nous attendons des réponses fermes, que, pour tout vous dire, nous n'avons pas eues aujourd'hui", a développé Marine Tondelier après son rendez-vous où elle demandaient des garanties sur l'écologie et la taxation des hauts patrimoines.
Sébastien Lecornu "n'arrive pas à boucler son équation" politique, a-t-elle estimé, regrettant la nomination de ce chef de gouvernement issu de la droite. "Si Emmanuel Macron avait voulu une rupture politique, il nous aurait nommés nous. Et donc soit M. Lecornu écoute et s'adapte, soit il sera renversé".
Ces entretiens ont lieu sous la pression de la rue, alors que les syndicats et les partis de gauche promettent une "journée noire" jeudi, protestant contre les mesures budgétaires "brutales" de François Bayrou.
Sébastien Lecornu a déjà fait des gestes en direction de la gauche et de l'opinion: retrait de la proposition impopulaire de supprimer deux jours fériés, premier déplacement consacré à l'accès aux soins, et suppression, très symbolique, des derniers avantages "à vie" octroyés aux ex-Premiers ministres.
"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution, nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a plaidé Olivier Faure. Mais s'il s'agissait de reprendre le projet de budget de François Bayrou "nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", a-t-il prévenu. Sébastien Lecornu pourrait prononcer sa DPG "début octobre", selon Marine Tondelier.
- "Aspiration majoritaire" -
Les socialistes comme les écologistes ont cité un sondage Ifop commandé par le PS montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.
Parmi elles, la création d'une taxe de 2% sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros - la fameuse taxe Zucman, qui enflamme ce débat budgétaire.
Sébastien Lecornu s'est dit prêt à travailler sur la "justice fiscale", mais il veut faire "attention au patrimoine professionnel" visé par cette taxe.
Le RN rejette de son côté la taxe Zucman, sans fermer la porte à une mise à contribution des plus fortunés. "Si la rupture consiste à un retour aux sources socialistes du macronisme, c'est contraire à l'aspiration majoritaire du pays", a mis en garde Marine Le Pen.
Un avertissement auquel le président de LR, Bruno Retailleau, a fait écho. "Si demain on pensait que l'orientation du gouvernement n'était pas conforme à l'intérêt supérieur de la nation (...), qu'est ce que l'on ferait de plus au gouvernement?", a-t-il prévenu.
Y.Slowik--GL